
┤ il va falloir beaucoup beaucoup beaucoup d’amour ├ by Camille MORAVIA
Show 19.12.15 > 21.12.15
Opening 18.12.15 > 18.00 h
Curateur Laurent QUENEHEN
Il va falloir beaucoup beaucoup beaucoup d’amour. Le titre de cette exposition est une phrase lancée par Camille Moravia sur le réseau social Facebook puis reprise par les artistes et les médias après les événements de Novembre. Elle touche un point sensible, ce qui manque parfois à la vie. Cela résonne comme un espoir porté sur le monde, mais la répétition des mots, inspirée par la rythmique de Marguerite Duras, peut rendre la formulation caduque, c’est une prière, une fiction qui deviendra peut-être une réalité. Camille Moravia questionne le cinéma et la littérature sur Facebook, elle met en scène une jeune femme dont le pseudonyme combine l’écrivain Alberto Moravia et le personnage de Camille dans ‘Le Mépris’ de Jean-Luc Godard. Ce film est un axe de l’artiste Camille Moravia, il s’ouvre sur cette phrase d’André Bazin : « Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s’accorde à nos désirs ». La mise en scène du personnage de Camille Moravia sur Facebook semble être celle qui s’accorde à ses envies du moment, ses rencontres, elle en est à la fois l’actrice et la réalisatrice. ‘Le Mépris’ est un film sur la fin du cinéma et la fin du couple. Michel Piccoli, alias Paul qui joue le réalisateur, se fourvoie dans une superproduction et perd Camille, comme Jean-Luc Godard lui-même, obligé par ses producteurs d’intégrer la scène de nu et dont le couple avec Anna Karina bat de l’aile. Ils divorceront peu de temps après la sortie du film ; le cinéma sent le réel comme le chien sent la chienne. Dans ses scénarii, Camille Moravia met en scène une vie, sa vie, elle photographie des femmes, des hommes, ponctue ses images par des mots blancs sur fond noir, elle rythme ses séquences de prises de vue par des phrases et poste aussi des chansons populaires, des chansons pour danser. Elle travaille rarement seule, elle aime les jeunes femmes dénudées et les hommes matures, se met elle-même en scène. Peut-être a-t-elle des relations intimes avec ses complices, on ne sait pas toujours où commence l’art dans la vie. Ses images sont chaudes et sensuelles, provocatrices diront certains, les corps sont ouverts, on suppose le plaisir derrière la pose, le jeu. Elles mettent en avant un point important : c’est le regardeur qui fait l’œuvre, c’est le violeur qui imagine l’allumeuse. Dans l’exposition comme sur Facebook, ce ne sont que des images, des reflets de réalité ou une vie au-delà du miroir, comme pour l’Alice de Lewis Carroll. Est-ce Camille Moravia qui s’inspire de sa réalité pour tourner ses séquences ? Ou est-ce une jeune femme pudique qui active l’artiste Camille Moravia ? Peu importe. Pier Paolo Pasolini disait de ce rapport contigu entre la fiction et la vie : « Dans mon film, l’homme est un roi mage napolitain à la poursuite d’une comète et en poursuivant cette comète, il fait l’expérience de réalité ». C’est cette expérience que nous vous proposons de faire dans cette exposition.
Laurent Quénéhen
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Camille Moravia est née le 8 décembre 1970 à Angers. Après un parcours scolaire sans vagues, elle intègre un BTS d’Action Commerciale dans lequel elle prend la mesure des syndromes compétitifs et des ventes à tout prix. Elle entreprend en parallèle une opération de marketing et de hacking sur les correspondances intimes d’hommes d’affaire. Le terrain est juteux, sa vie est menacée le 15 juillet 1999, lorsqu’on lui inocule par lettre anonyme « The lock virus » ou « CCN » (Chronic Contagious Nymphomania, Chyeah Chyeah Nigga!). Pour y remédier elle tombe amoureuse et s’enferme dans un appartement parisien pendant 10 ans, écrivant toutes ses sensations sur les murs. Le résultat est une catastrophe sentimentale. C’est lorsqu’on lui rouvrira la porte, qu’elle dira ces phrases qui la révèleront au réseau, et composeront le titre d’un ouvrage collectif consacré au sexe dans les relations au long terme : ‘Avant de partir de chez lui, tu conjugueras le verbe « savoir » à l’imparfait du subjonctif. La première personne du singulier suffira’.